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La notion d’« imaginaire », souvent associée aux perspectives archétypologiques, a longtemps été suspectée par les historiens et, plus largement, par ceux et celles qui, issus des disciplines culturelles et sociales, rattachent les phénomènes humains et langagiers à des forces sociohistoriques particulières plutôt qu’à des grandes matrices « universelles ». La notion a pourtant aujourd’hui, depuis la théorisation fondamentale proposée par Cornelius Castoriadis, sa déclinaison sociale. Elle suscite d’ailleurs, depuis quelques années, un engouement dans le champ des études historiques et culturelles, bénéficiant assurément d’un certain effet de mode. Ses occurrences sont nombreuses (l’expression « l’imaginaire de » s’est répandue) mais la notion reste encore assez rarement conceptualisée, comme en témoigne à sa manière l’ouvrage de Pascal Ory consacré à l’histoire culturelle : l’« imaginaire social » y est présenté comme l’objet par excellence de cette discipline mais le concept n’y est pourtant pas défini.

La publication, au printemps 2016, d’un Dialogue sur l’histoire et l’imaginaire social (1985) entre Ricoeur et Castoriadis a rappelé l’actualité et l’importance de la théorie castoriadienne de l’« imaginaire social instituant ». Mais la discussion entre les deux philosophes en fait également apparaître les lacunes ou, pour mieux dire, les pierres d’achoppement. Pour Castoriadis, l’imaginaire social, moteur des transformations historiques et culturelles, est une « création incessante et essentiellement indéterminée » de représentations du monde et de formes de vie, l’« indétermination » renvoyant à la possibilité, à la capacité humaine de toujours faire advenir et de « faire être des formes autres ». Or l’entretien avec Ricoeur porte précisément sur les facteurs et conditions (historiques, sociales, culturelles) qui limitent l’indétermination de cette capacité créative qu’est l’imaginaire.

Le concept d’imaginaire social permettrait-il d’appréhender, dans le domaine historique et culturel, la création de formes nouvelles ? Doit-on, d’ailleurs, le penser comme une « création », ce qui suppose l’avènement d’une nouveauté radicale, ou plutôt comme une « production », idée qui suggère, au contraire, que chaque nouvelle configuration ne peut être produite qu’à partir de configurations existantes et sédimentées, sur la base d’une reproduction partielle du préexistant ? La difficulté réside sans doute dans le passage du spéculatif au concret : la définition de l’imaginaire social comme création de formes nouvelles (Castoriadis) ou comme « dialectique de l’innovation et de la sédimentation » (Ricoeur) résiste-t-elle à l’épreuve de l’analyse historique et littéraire des discours, des oeuvres et des représentations du monde ?
C’est pour tenter de répondre à ces questions que quelques chercheurs s’efforcent aujourd’hui, tant en sociocritique qu’en histoire culturelle, de théoriser rigoureusement l’« imaginaire social ». Le présent colloque, qui entend réunir autour de cette notion des chercheurs issus de disciplines variés, voudrait poursuivre cet effort de théorisation en soumettant le concept à l’épreuve d’analyses concrètes. Défini essentiellement comme l’ensemble des représentations que produisent, partagent et diffusent les membres d’une société pour lire et interpréter le monde qui les entoure, l’« imaginaire social » fait intervenir, dans le champ de l’analyse historique ou culturelle, une série de concepts issus de la sémiologie : « représentations » (Kalifa, Gagnon), « significations » (Castoriadis), « sémiosis sociale » (Popovic), etc. Se situant au point de rencontre entre théories de l’histoire et de la société et théories du langage et des représentations, la notion appelle, sur le plan théorique, un dialogue interdisciplinaire dont ce colloque souhaite être l’occasion.
 
Dans le cadre du colloque, une soirée de projection aura lieu le jeudi 14 septembre à 19h à la Cinémathèque québécoise.

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